Introduction
L’intelligence artificielle (IA) s’immisce de plus en plus dans le domaine médical, non seulement dans la recherche, mais aussi dans l’aide à la décision clinique, la documentation, l’éducation des patients, et plus encore. Dans ce contexte, MedGPT est un nom qui revient fréquemment. Mais qu’est-ce que MedGPT exactement ? Quels sont ses promesses et ses risques ? Et comment pourrait-il transformer la pratique médicale ? Cet article propose un panorama de ce concept, en s’appuyant sur les développements en cours et les publications disponibles.
Qu’est-ce que “MedGPT” ?
En réalité, le terme “MedGPT” peut recouvrir plusieurs variantes selon les projets et les contextes. On peut distinguer au moins deux axes :
- “MedGPT” comme projet européen d’IA médicale souveraine
- Le projet MedGPT vise à concevoir une IA médicalisée “éthique” conforme aux réglementations européennes (RGPD, MDR, futur règlement AI de l’UE) et adaptée aux systèmes de santé européens.
- L’idée est de bâtir des modèles de langue (LLM) spécialisés, aux architectures optimisées (“smart small models”) et audités pour garantir transparence, explicabilité et sécurité.
- Le projet est porté par un consortium incluant des acteurs académiques, hospitaliers et industriels de plusieurs pays européens.
- “MedGPT” comme application grand public / outil médical d’appoint
- Il existe une application “MedGPT” (by whoCodes) qui se présente comme un assistant de santé — permettant de rechercher des informations sur les médicaments, leurs effets, les maladies, etc.
- Cette version “app / chatbot médical” s’adresse autant à des patients qu’à des professionnels ou curieux, mais avec la mise en garde que les réponses ne remplacent pas un avis médical.
- Il y a aussi une version “MedGPT” orientée vers la documentation médicale, la relecture de dossiers cliniques, ou le “charting & review” dans certains contextes hospitaliers.
Il faut donc être prudent et bien préciser de quelle version on parle lorsque l’on évoque “MedGPT”.
Ce que propose MedGPT (fonctionnalités attendues / déjà implémentées)
Selon les sources disponibles, voici les principales fonctionnalités (promises ou déjà implémentées) de MedGPT :
| Fonctionnalité | Description | Potentiel / usage |
|---|---|---|
| Recherche d’informations médicales | Donner des données sur les médicaments (posologie, effets secondaires, interactions), les maladies (symptômes, diagnostic, traitement). | Pour les patients, pharmacien, médecins cherchant une réponse rapide. |
| Assistance clinique | Aide dans la formulation d’hypothèses diagnostiques, suggestions d’examens complémentaires, propositions de protocoles (en respectant les guidelines). | Outil d’aide à la décision pour les cliniciens (mais non substitut). |
| Documentation / relecture de dossiers | Automatiser la rédaction des notes médicales, structurer les dossiers, surligner les points clés, vérifier la cohérence. | Gain de temps administratif, soutien clinique. |
| Analyse d’images médicales (dans certaines versions) | Acceptation d’images (radiographies, IRM, pathologie, etc.) pour générer un rapport succinct. | Usage en support radiologique ou diagnostique (dans un cadre de recherche ou d’appoint). |
| Conformité éthique / juridique / sécurité | Audits de modèles, vérification de la traçabilité, transparence, respect du RGPD / MDR. | Essentiel pour usage clinique réel, acceptabilité par les autorités de santé. |
Un exemple académique : “MedGPT” pour la prédiction de concepts médicaux
Avant les versions récentes grand public ou institutionnelles, le terme “MedGPT” a aussi été utilisé dans la littérature pour désigner un modèle d’IA appliqué aux dossiers de santé.
Dans la publication “MedGPT: Medical Concept Prediction from Clinical Narratives” (2021) :
- Les auteurs proposent un pipeline transformeur qui ingère le texte libre des dossiers hospitaliers, structure les entités médicales via des outils de reconnaissance d’entités (NER / linking), et prédit des événements médicaux futurs (nouvelles maladies, complications).
- L’approche permet d’améliorer la performance par rapport à des modèles plus classiques (LSTM) pour certains prédicats médicaux (par exemple “Top-1”, “Top-3”, “Top-5” prédictions).
- Ce travail illustre ce que peuvent offrir les architectures “GPT-like” dans le contexte médical à partir des données textuelles cliniques existantes.
Cette version “académique” est plus experte, limitée à des usages de recherche ou d’aide à la prédiction, et ne prétend pas remplacer un clinicien ou fournir des diagnostics autonomes.
Forces et promesses de MedGPT
Voici les principaux avantages que l’on peut espérer ou observer :
- Gain de temps et assistance dans la charge cognitive
Les médecins passent beaucoup de temps en documentation, recherche d’informations, synthèse de dossiers — une IA bien intégrée pourrait alléger ces tâches. - Uniformisation et mise à jour continue
Un modèle pourrait intégrer automatiquement les dernières recommandations (guidelines), articles ou mises à jour médicales, réduisant le fossé entre la recherche et la pratique clinique. - Personalisation contextuelle
Contrairement aux chatbots généralistes, MedGPT (version “clinique”) peut être calibré pour un territoire, un système de santé, une langue, des protocoles locaux, ce qui en renforce la pertinence. - Sécurité et conformité régulatoire
Le choix de construire une IA souveraine « européenne » dispose d’un avantage stratégique (contrôle des données, respect des lois locales) sur des modèles étrangers non adaptés aux contextes nationaux. medgpt.dev+2itea4.org+2 - Potentiel de recherche / innovation
En tant que plateforme modulaire, MedGPT pourrait servir de base à des développements spécialisés (par exemple, en neurologie, oncologie, imagerie) en croisant données multimodales.
Limites, risques et obstacles
Cependant, plusieurs défis sont à surmonter, et certaines limites sont intrinsèques :
- Validité clinique et fiabilité
Même une IA très bien entraînée peut faire des erreurs, halluciner ou proposer des suggestions inadéquates. Il faudra des validations rigoureuses, des études cliniques, et des mécanismes de contrôle. - Responsabilité légale
En cas d’erreur, qui est responsable ? Le système d’IA ? Le médecin qui l’utilise ? Le fournisseur ? Ce flou juridique doit être clarifié. - Acceptabilité par les professionnels
Les médecins peuvent hésiter à se fier à une “boîte noire” ou craindre une perte de contrôle. Il faudra un effort de formation, de transparence et de co-conception. - Protection des données sensibles
Les données médicales sont parmi les plus sensibles. Même avec respect du RGPD, tout service doit garantir une sécurité maximale, anonymisation, chiffrement, audits. - Coût, infrastructure et maintenance
Déployer une IA dans un hôpital ou dans un système de santé exige des ressources informatiques, de la maintenance continue, des mises à jour… ce n’est pas “installer l’appli et ça marche”. - Généralisation / robustesse inter-domaines
Un modèle bien adapté à un hôpital de référence ne fonctionnera peut-être pas aussi bien dans un hôpital de campagne avec d’autres profils de patients, ou dans des contextes culturels très différents.
Scénarios d’usage concrets
Voici quelques scénarios où MedGPT pourrait s’avérer utile :
- En urgence, un clinicien interroge l’IA pour envisager des diagnostics rares compte tenu d’un tableau clinique atypique, puis valide ou rejette les suggestions.
- En médecine ambulatoire, un médecin traitant l’utilise pour vérifier les interactions médicamenteuses complexes dans un protocole.
- Dans des pays à faible ressource, une version “MedGPT light” pourrait aider des généralistes ou assistants de santé à formuler les bonnes hypothèses avant réfèrencement.
- Dans la recherche clinique, MedGPT peut assister à la revue de la littérature, identifier les lacunes, aider à la rédaction d’articles ou protocoles.
- Dans le suivi à distance des patients, une version “patient-facing” pourrait répondre à des questions courantes, donner de l’éducation thérapeutique, détecter des signaux rouges (avec alerte à un professionnel).
Où en est-on aujourd’hui ?
- Le projet MedGPT européen est actif, structuré, avec un consortium multi-pays, et vise un déploiement à l’horizon 2025–2027.
- En France, Synapse Medicine a récemment lancé une version de MedGPT, se positionnant comme un “assistant médical conversationnel” local, surpassant selon eux ChatGPT dans certains examens médicaux français.
- L’application “MedGPT” grand public (whoCodes) est déjà téléchargeable, avec des fonctionnalités de recherche médicale, bien que ses garanties juridiques ou médicales soient limitées.
Donc, si l’outil existe déjà dans certaines versions, les versions “cliniques robustes et validées” sont encore en cours de développement ou de test.
Ce qu’il faut retenir (conclusion)
MedGPT, sous ses diverses formes, incarne l’ambition de rapprocher l’IA de la pratique médicale, en ajoutant une couche de spécialisation, de conformité et d’utilité concrète. Si le projet aboutit à des versions fiables, transparentes et sécurisées, il pourrait transformer la médecine en aidant à réduire la charge cognitive, à accélérer l’accès aux connaissances, et à standardiser certaines prises de décision.
Mais la prudence est de mise : l’adoption, la confiance, la validation clinique, la responsabilité légale et la sécurité des données sont des défis majeurs à relever. Il ne s’agit pas de remplacer le professionnel de santé, mais de l’épauler dans son travail.



